5h13

Géraldine, de son nom d’artiste 5h13, a fait une résidence artistique à Catalyse du 12 au 22 août 2024 pour préparer son prochain set. 5h13 c’est du spoken word qui tangue entre récit intimes et stop motion artisanal.

Présentation

Comment as-tu commencé dans la musique?

J’ai fait des études de documentaire, d’anthropologie et de cinéma mais j’ai également toujours été passionnée par la musique. J’ai donc fait des stages en communication dans des festivals de musique pour me rapprocher de cet univers.

J’ai toujours eu envie d’être sur scène mais j’étais trop timide. A 18 ans, je préférais bosser dans le domaine de la musique mais sans être sur scène. Le temps est passé et cette envie de faire de la musique a grandi. J’ai alors compris à force d’évoluer au côté d’artistes qui se produisaient en live que je voulais vraiment m’exprimer sur scène.

Que signifie ton nom d'artiste 5h13 ? Quel est ton genre musical ?

En 2018 j’ai fait un premier son de rap complété par un clip DIY. A l’époque, mon nom d’artiste était Jasmin. Puis j’ai changé pour 5h13, qui est mon heure de naissance. C’est un nom flou et peu significatif, l’heure de naissance c’est très random et en même temps, si on croit en l’astrologie, ça peut être bien plus significatif que cela.

Comme je voulais faire de la scène il fallait un style qui corresponde à ce que je suis capable de faire. J’avais fait des podcasts et les gens trouvaient que j’avais une voix reposante. J’ai alors découvert le spoken word, le fait de parler sur une instru. C’est une sorte de slam, un courant américain à la base.

A l’époque j’avais donc combiné le parler avec du rap mais je n’arrivais pas à trouver de cohérence entre les deux styles. Donc je suis resté sur le parler, complété par un univers et une musicalité autour.

Quels artistes ou mouvements artistiques t’inspirent le plus?

Ce ne sont pas forcément des styles proches de mon univers. Mon groupe préféré est « La Dispute » ils font du post hardcore mais certaines thématiques de texte se rapprochent de moi. Ensuite il y a « Hotel Books », ce groupe « m’a mis une claque » car il exprime ses textes d’une manière très intense.

Je suis également inspiré par « Hobo Johnson », « Fauve » que j’adorais à l’époque et qui se rapproche de ce que je fais. J’adore aussi « CocoRosie » que j’écoute depuis l’adolescence. C’est très lofi, DIY, elles intègrent des objets de la vie quotidienne à leur son, l’une d’elles rap et l’autre fait du chant lyrics. Je trouve ce mélange intéressant.

Tes différentes passions: la musique, la bande dessinée, la production de festivals, le tatouage, s'enrichissent-elles mutuellement dans ton processus créatif?

J’aime plein de branches de l’art et j’ai eu une période avec un large lancement de projets.

J’ai fait une BD pour donner suite à une expérience de travail avec les enfants dans les écoles, je me suis noté beaucoup de phrases marrantes à force de parler avec eux et j’en ai fait une BD. Le tatouage est venu après, quand j’habitais à Montréal, j’aime aussi cet art et j’ai ouvert un salon de tatouage en Hongrie à Budapest pendant 4 ans. Je travaille également en tant qu’intermittente du spectacle, mais tout ça ne me laisse pas suffisamment de temps pour créer de la musique. Donc j’essaie de me recentrer principalement sur la musique pour vraiment progresser.

Travail actuel

Quels sont les projets artistiques sur lesquels tu travailles actuellement?

Je travaille sur un set de 30-35 minutes qui serait principalement une première partie. Grâce à mon accompagnement pendant deux ans avec la salle de spectacle Château rouge à Annemasse, je vais faire la première partie de la chanteuse Camille.
Je travaille aussi en parallèle ce même set mais sur un format entre 45min et 1h15, car j’ai eu une proposition de date de cette durée-là.

J’ai tourné un film il y’a deux ans que je suis en train de monter. Il sera projeté derrière moi pendant mon live d’une dizaine de chansons. Dans la forme plus longue, ce sera vraiment un ciné-concert : dans les temps de pause il y aura du bruitage qui alimentera le film muet.

Ce projet est articulé autour des étapes du deuil, une forme de mort, celle de la rupture amoureuse. On pourra parcourir ses différentes étapes : choc, déni, colère… Les différentes chansons et jeu de lumières feront passer les différentes émotions liées au deuil. Les images seront abstraites, poétiques, et imagées un peu comme dans un rêve ou un cauchemar.

Mon amour de la vidéo combiné à ma timidité font que j’ai besoin d’être caché dans un univers, une scénographie et une bulle dans laquelle on rentre. Toute la scénographie sera aussi importante pour moi que la musique. Pour que l’attention du public soit nourrie par différents canaux.

Quel message ou émotion, cherches-tu à transmettre à travers ta musique? Quels genres de retours sur ton travail t’encouragent à continuer?

J’ai envie que les gens soient émus et touchés. Que ce que je raconte leur parle, qu’on ressente les choses ensemble et qu’on se comprenne. Les artistes qui m’ont influencé m’ont beaucoup aidé à des périodes ou je n’allais pas bien car ils mettaient des mots sur ce que je ressentais.

Concernant les retours des professionnels, ils sont assez troublants, parfois contradictoires. Quand je chante en anglais, certains aiment mon accent français en anglais d’autres me demandent de l’estomper, certains me disent de ne pas chanter car je ne suis pas suffisamment juste et d’autres me disent que c’est cool quand je chante aussi sur mon parlé. Donc je suis mon instinct et ce qui m’intéresse, je décide à la fin de ce que je produis mais je suis très ouverte aux avis des professionnels.

Au final il n’y a pas une bonne façon de faire, il faut juste trouver la façon qui nous correspond le plus et foncer.

Qu’est-ce qui inspire tes textes et tes sons?

Mon histoire, les émotions que j’ai vécues, j’aurai du mal à exprimer des émotions que je n’ai pas ressenties au fond de moi.

Si tu devais collaborer avec un artiste actuel ou d'une autre époque ou discipline, qui choisirais-tu et quel genre d'œuvre créeriez-vous ensemble?

Avec l’artiste Sophie Calle, grâce à son œuvre « prenez soin de vous ». Elle a reçu une lettre de rupture par mail et elle ne savait pas du tout quoi en faire. Alors, elle a pris cette lettre et l’a envoyé à 107 femmes de profession différentes qui ont analysé cette lettre sous le prisme de cette profession.

Je trouve ça incroyable et moderne. Comme mon sujet de travail est la rupture et qu’elle a des idées percutantes et impressionnantes je pense qu’on pourrait créer une œuvre intéressante ensemble.

Expérience à Catalyse

Comment ta résidence dans notre pôle artistique a influencé ton travail? Y a-t-il des avantages spécifiques à travailler ici?

Je ne me suis jamais retrouvée dans un cadre qui me permet de ne faire que créer et penser à mon art. Ici à Catalyse, pendant 10 jours de 9h à 18h, je n’ai fait que ça. C’était assez incroyable car finalement quand on créer, on est souvent coupé par des choses de la vie, du travail.

N’avoir que ça à faire, c’est vraiment incroyable. Dur parfois, car je n’ai pas l’habitude de le faire pendant des journées entières. J’étais parti avec une liste énorme de choses à faire. J’ai essayé de varier mes journées car créer toute la journée c’est un peu compliqué mais ça m’a permis d’apprendre à me servir de certaines machines notamment un gros PAD de batterie et une pédale d’effet de voix.

Il a fallu faire des réglages pour chaque chanson, tester les effets toute la journée.
C’est génial pour la mise en scène et les chansons. Avant, quand j’avais une idée, j’avais l’opportunité de tester la mise en scène plusieurs semaines, voire des mois après. Alors que là, quand j’ai une idée, hop tu branches, tu test tout de suite et tu sais si ça fonctionne ou pas. Être dans la salle de concert permet l’instantanéité du test des éléments créatifs que je trouve et que je souhaite ajouter. Je suis vite fixée, tout le matériel est installé. La salle de concert c’est très confortable pour avancer.
Le lieu est également inspirant, l’espace du grand garage en bas est inspirant, j’ai pu filmer certains plans film. Je me suis organisée des temps d’écriture, test audio, temps de création, j’ai été très inspirée.

Y a-t-il une œuvre musicale particulière que tu as créée, développée, ici et qui est spéciale à tes yeux?

Je me suis formé sur un logiciel de création et j’ai réussi à créer une instrumentale, c’est une chose que je ne fais jamais d’habitude. Cette instru est à destination du teaser que je vais créer pour mon projet. J’ai aussi beaucoup avancé la construction de mon set, notamment les transitions entre les chansons.

Vision future

Comment vois-tu l'évolution de ton travail dans les prochaines années? As-tu des objectifs artistiques à moyen, long terme?

Courant septembre, je vais finir d’écrire mes chansons et de monter mon film. J’ai également une résidence à Château rouge, l’occasion pour moi de peaufiner mon spectacle et de tester les derniers éléments artistiques que je souhaite intégrer. Ensuite, en novembre, j’ai une dernière résidence à Cannes, ma ville d’origine. Ce sera dans une salle de concert, sur scène avec un ingénieur son en condition réelle. Ainsi je ferai le test live de mon spectacle avec la totalité des éléments : vidéo, instrument, voix.

Une fois mon projet terminé, je pourrai l’envoyer aux acteurs du territoire pour essayer d’être programmée et pourquoi pas développer des formats plus longs. J’espère avoir l’opportunité de jouer mon spectacle régulièrement en 2025-2026.

Ensuite on verra, J’espère avoir la chance d’avoir une belle programmation et je resterai normalement sur le marché francophone (France, Suisse, Benelux) et pourquoi pas aussi au Canada. J’ai un amour-haine très fort avec mes expériences liées à la ville de Montréal dans laquelle j’ai vécu plusieurs années et ce serait très fort pour moi d’aller jouer là-bas.

Quel est l’endroit où tu rêves de chanter?

Si on rêve je dirai l’Olympia, voir mon nom sur ces grosses lettres en rouge ce serait vraiment un accomplissement pour moi.

Où pouvons-nous écouter ta musique, suivre tes actualités en ce moment?

En juin, j’ai sorti un premier EP de 5 titres sur Spotify, vous pouvez trouver quelques-uns de mes clips sur Youtube. Puis, pour me suivre au jour le jour, les réseaux sociaux sont un bon canal.